Delacroix, un romantique à Paris

Eugène Delacroix est sans doute le plus célèbre et le plus parisien des peintres romantiques. Preuve de sa popularité auprès du public de son temps, les plus hautes instances de l’État lui commandent des œuvres pour les prestigieux édifices de la capitale.

La vie et la carrière d’Eugène Delacroix sont intimement liées à Paris, dont il fut d’ailleurs membre du conseil municipal en 1851. Le peintre passe sa jeunesse sur la rive gauche, d’abord au numéro 50 de la rue de Grenelle, avec sa mère et sa sœur Henriette en 1806, puis au numéro 114 de la rue de l’Université, de 1807 à 1820. Il déménage ensuite pour le numéro 22 de la rue de la Planche, actuelle rue de Varenne, puis pour le numéro 118 de la rue de Grenelle, en 1823. En 1825, il retrouve la rue de l’Université et occupe pendant trois ans un appartement avec son ami Jean-Baptiste Pierret.

De Saint-Germain à la Nouvelle Athènes

À la même époque, Delacroix installe son atelier au numéro 20 de la rue Jacob, avant de le déménager au numéro 14 de la rue d’Assas. En 1829, il opte pour un nouveau logement au numéro 15 du quai Voltaire, où se trouve également son atelier. En 1844, il quitte la rive gauche et émigre vers le quartier phare du mouvement romantique, la Nouvelle Athènes, dans le IXe arrondissement.

Là, il s’installe au numéro 54 rue Notre-Dame-de-lorette. Il y restera jusqu’en 1857, année où il revient à Saint-Germain-des-Prés, essentiellement pour se rapprocher de son chantier monumental dans l’église Saint-Sulpice. Delacroix prend alors ses quartiers au numéro 6 de la place de Fürstenberg, dans un bâtiment où habiteront également les peintres Claude Monet et Frédéric Bazille, et qui abrite aujourd’hui le musée national Eugène-Delacroix.

Les décors du Palais-Bourbon

C’est en 1883 qu’Adolphe Thiers, futur ministre de l’Intérieur, passe à Delacroix sa première commande officielle, en lui demandant de réaliser la décoration du salon du Roi à l’Assemblée nationale. Très reconnaissant, le peintre exprimera sa gratitude à l’homme d’État en ces mots : « Vous m’avez offert, par pure amitié pour moi, une des occasions décisives qui ouvrent à un artiste une carrière toute nouvelle et qui doivent l’agrandir nécessairement, si elles ne mettent à nu son impuissance ».

Achevées en 1837, les décorations se composent d’une frise peinte à l’huile et d’un plafond carré. Ce dernier représente une allégorie sur chacun des côtés: l’Industrie, la Justice, l’Agriculture et la Guerre. Quelques années plus tard, en 1838, on commande à Delacroix la réalisation des plafonds de la bibliothèque de l’Assemblée. On peut toujours en admirer les cinq coupoles aujourd’hui, représentant la Législation au centre, la Théologie et la Poésie d’un côté et la Philosophie et les Sciences de l’autre. L’ensemble est encadré de deux culs-de-four, évoquant respectivement la Paix et la Guerre.

Du Marais à Saint-Sulpice

Concernant les édifices religieux, notre promenade sur les pas de Delacroix nous emmène dans le Marais, où deux églises abritent des œuvres du peintre romantique. Dans l’église Saint-Paul-Saint-Louis, rue Saint-Antoine, se trouve ainsi Le Christ au jardin des Oliviers (1827), tandis qu’à Saint-Denys-du-Saint-Sacrement, rue de Turenne, une superbe piéta a été installée dans la chapelle de la Vierge.

De cette œuvre, Baudelaire écrira qu’elle est un « chef-d’œuvre qui laisse dans l’esprit un sillon profond de mélancolie ». Enfin le dernier grand chantier de Delacroix sera dans l’église Saint-Sulpice, dans le VIe arrondissement. Entre 1850 et 1861, on lui commande en effet la décoration de la chapelle des Saints-Anges, constituée d’un plafond représentant saint Michel terrassant le dragon et des peintures murales figurant Héliodore chassé du Temple et la lutte de Jacob avec l’ange.

Du Sénat au Louvre

En marge de ces grands chantiers, on doit également à Delacroix les fresques de la bibliothèque du Sénat, réalisées dans les années 1840. Le Louvre abrite aussi un nombre important de ses toiles ainsi qu’un plafond réalisé par le peintre en 1850-1851, au centre de la galerie d’Apollon. Enfin, à quelques pas de là, la Comédie-Française renferme dans ses collections un tableau du début des années 1850, montrant un célèbre acteur de l’époque, Talma, costumé en Néron dans Britannicus.

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